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Pourquoi un WOD CAP 10km ?

Traduction d’un article du Crossfit Journal nous présentant les intérêt d’un WOD Course à pied de 10km dans la programmation d’un crossfiteur:

 

Pourquoi un WOD CAP 10km ?

J’avais planifié de poursuivre mon article de novembre sur la biomécanique de la colonne vertébrale pour les haltérophiles en discutant à propos des blessures potentielles dues aux levés de charges répétées. Dans cet article, j’ai parlé du danger de l’excédant de force sur la colonne avec une exécution incorrecte. Cependant, les blessures apparaissent souvent dans des programme de remise en forme à cause de levé de charges légères répété plutôt que des charges très lourdes.

Ensuite, en octobre, un événement s’est passé sur crossfit.com qui a confirmé mes idées. Le 16.10.2007, le WOD fût « CAP 10km ». Les commentaires contenaient les habituelles complaintes provenant de personnes qui n’aiment pas courir mais rien de très original. Seulement, 3 jours après, le 19 donc, le WOD fût « CAP 10km ». Les 5 premiers commentaires vous donneront une indication sur la réaction générale :

« 1. Hein ? Vraiment ?
2. Encore ?
3. Sérieusement ? Y a-t-il une méthodologie ? Est-ce une erreur ?
4. Vous pensez que c’est le 1er avril ?
5. ??? »

Certains commentaires démontrent de la surprise, comme ceux plus haut, et il y en d’autres qui montrent des complaintes, mais ce commentaire de RoyG m’intéresse plus :

« Comment, en accord avec la philosophie crossfit, peut-on voir apparaitre un WOD CAP 10km ?

Citation du pdf « les fondations » : « En crossfit, nous travaillons exclusivement avec des entrainements courts à haute intensité cardiovasculaire. » + « Il y a un faux postulat qui prétend que les athlètes de longues distances sont plus en forme que ceux de distances courtes. Les triathlètes, les cyclistes, les marathoniens sont souvent perçus comme parmi les athlètes les plus en forme. Rien ne peut être plus éloigné de la vérité. »

Un 10km n’est pas trop long? J’aimerais avoir une réponse de quelqu’un qui s’intéresse à la méthodologie du crossfit à propos de la fréquence des différents wod. Est-ce complètement aléatoire? »

Je pense que ce commentaire pose de bonnes questions. Donc ce mois j’y répondrai au mieux.

Alors pourquoi devrait-on courir 10km ?

Si vous avez adopté la philosophie crossfit, j’imagine que vous seriez de mon avis en disant que courir des distances considérables est fonctionnel. En effet, l’être humain a évolué en chassant des animaux, en rassemblant de la nourriture, en migrant selon les saisons, etc, en parcourant des grandes distances, de telle sorte que cela fait partie de notre patrimoine génétique.

Concernant les questions de RoyG sur le caractère aléatoire des wod. J’en ai parlé dans un ancien article où j’ai affirmé que l’extraordinaire variété des entrainements est quelque fois décrite comme « aléatoire », mais évidemment ce n’est pas dans son sens littéral. Avec un programme vraiment aléatoire, vous pourriez avoir 3 « CFT » ou 2 « Cindy » à la suite. J’argumente en affirmant que la variété du crossfit permet un développement complet du corps. Le crossfit permet un développement dans les 10 fitness physical skills, l’endurance en fait partie.

Mais la question sur la pertinence de faire un 10km est juste. Les bénéfices d’un tel entrainement peut être expliqué ainsi : Les longues distances (60-120min) de course à 70% de sa VO2 max n’améliore pas ni sa capacité cardiovasculaire ni sa VO2 max. D’un point de vue physiologique, tout le bénéfice est dans « l’amélioration des… »blabla scientifique ». L’athlète peut courir plus longtemps mais pas plus vite » En soi-même ce n’est pas un mauvais but bien sûr-de courir plus longtemps. Et certainement l’endurance permet une amélioration des muscles utilisés. Cependant, vous ne devriez pas vous entraîner seulement avec de l’endurance légère (comme de nombreuses personnes font), mais cela ne signifie pas que vous devez le bannir complètement.

Une autre raison de courir occasionnellement de longue distance est le caractère « mécanique ». Dans les articles de ces derniers mois sur les mécanismes de la colonne vertébrale et les dangers inhérents à la mauvaise exécution de certains exos (soulevé de terre et consorts), j’ai présenté les différentes compressions de la colonne durant un bon et un mauvais deadlift. Si un tissu est tendu trop fort, il va rompre. La figure suivante présente un graphique approximatif sur la tolérance des tissus:

Le mois dernier j’ai observé premièrement comment apparaissent les blessures dues aux mauvaises exécutions de 1 ou peu de réps avec une lourde charge (le haut de la courbe). Mais il est également vrai que les tissus peuvent devenir endommagés à cause de forces légères si celles-ci sont appliquées de manière répétée et sans temps de repos adéquat.

Beaucoup d’athlètes, spécialement chez ceux-ci spécialisés dans les longues distances ou activités longues, souffrent de douleurs chroniques causées par des recrutements répétés de tissus à faible charge (bas de la courbe). Les coureurs expérimentent souvent ces blessures aux genoux, chevilles, etc. Les nageurs également avec des tendinites ou des problèmes à la coiffe des rotateurs.

La réponse d’un tissu à un recrutement mécanique est complexe, mais imaginez un bout de métal se briser après avoir été plié dans tous les sens. Vous n’allez pas le casser après un gros effort unique mais après des petits « pliages » répétitifs. Ce n’est pas exactement ce qui se passe quand un tendon est exposé à des stress mécaniques répétés, mais c’est ressemblant, quand répétitivement mis à contribution, les tendons ou ligaments ne peuvent jamais recouvrer leur état initial. Ce manque de repos et de réparation des tissus va ultimement baisser leur capacité à supporter des forces, et va pour finir provoquer une blessure, qui ne serait pas apparue si la force sur les tendons était appliquée à moindre fréquence.
Les blessures de course sont les exemples les plus communs de ce stress répétitif. Chaque foulée est une collision avec le sol. Le nombre de foulée que vous effectuez durant un 10km dépend de votre grandeur, mais la moyenne est entre 6000 et 7000 !

La quantité de la force de contact va dépendre de votre poids et de votre style de course, mais pour la plupart des athlètes, c’est 3 fois leur poids du corps. Un autre facteur est le nombre très important de ces impacts: plusieurs milliers. Des milliers de foulées qui appliquent plusieurs centaines de kilos de force, exécutés à haute fréquence. On imagine les dommages pour les tendons, ligaments, articulations, etc…

Je peux poser l’argument que courir 10km est rude pour votre corps. En plus des potentielles blessures aux tendons, muscles, etc, les traumas associés à la course est la majeure cause d’hémolyse. L’hémolyse correspond à la rupture des globules rouges, et donc l’hémoglobine qu’ils contiennent est déversée dans le plasma. Des études ont montré que du vélo à 75% de son Vo2max ne cause pas la même quantité d’hémolyse que la course à même intensité. La même comparaison peut être faite avec le rameur.

Alors quel est mon but à la fin vous allez me dire ? Suis-je en train de dire qu’il ne faut pas faire des 10km ? Non. Bien que le crossfit puisse effectivement vous construire un haut niveau en aérobie grâce à l’interval training et autres activités anaérobiques à haute intensité, ils ne vont pas stimuler les mécanismes inhérents à une longue course. Par exemple, un split jerk avec grosse charge provoquera de gros contact avec le sol. Mais combien de réps faites vous par séance ? Même dans un programme basé en partie sur la nécessité de la variété, le principe de spécificité ne peut pas être ignoré, et le but du crossfit est de préparer l’athlète à tout ce que la vie peut mettre sur son chemin. La course, les box jumps, les push jerks et n’importe quel autres exos avec gros contact des pieds au sol vont améliorer la résistance de vos tissus, mais aucun entrainement ne va requérir 6000 ou 7000 foulée. Il est donc utile de l’intégrer de temps en temps.

Alors pourquoi ces explications sur les blessures potentielles et l’hémolyse ? Le truc c’est qu’avec toutes ces modifications de l’homéostasie, il y a toujours un niveau optimal de stress où le tissu peut recouvrer son état sans atteinte. Comme il « guérit », le corps est forcé de s’adapter et devient plus fort et meilleur pour résister aux prochains outrages physiques. L’exemple du bout de métal qui se plie utilisé auparavant ne doit pas nous faire oublier que le tissu humain peut se réparer lui-même si on lui offre un temps de repos suffisant. Une des raisons qui rend le crossfit si sécuritaire est qu’on ne se spécialise pas, et même si vous travaillez dur un jour, le lendemain vous pourrez faire votre wod encore à 100%, puisque vous ne faites pas les même mouvements. Même si vos jambes vont se fatiguer, votre haut du corps va se reposer pendant un 10km. C’est une des choses fascinantes à propos du crossfit : comment il peut vous faire travailler dur avec la disposition 3 jours on 1 jour off. Une programmation qui épargne des blessures (avec un scaling adéquat pour les débutants évidement).

La figure 2 montre la relation entre la charge soulevée et le risque de blessure. Les sédentaires risquent de se blesser parce que leurs tissus ne sont pas habitués à l’exercice, de ce fait ils peuvent se blesser même avec une faible charge (gauche de la courbe), et les athlètes spécialisés ont un risque de blessures aussi élevé, car ils font de très nombreuses exécutions (droite de la courbe). Le crossfit nous renforce, même si il reste quand même certains risques, mais l’intensité est ce qui va vous apporter des résultats. La clé est de pratiquer un travail dur et un haut rendement, mais en laissant assez de temps de repos pour vos tendons, muscles, etc, pour qu’ils aient suffisamment de repos pour éviter les blessures. Je crois que le crossfit réussit cet objectif.

Alors peut-être vous ai-je convaincu que parcourir une distance raisonnable est un bon wod avec des bénéfices physiologiques et mécaniques. Mais alors pourquoi deux fois en 4 jours, comme en octobre ? Ou peut-être devrais-je dire…pourquoi pas ? Bien que « aléatoire », le crossfit propose intentionnellement une variété de challenges, qu’ils soient du domaine physique et mental, et souvent les 2 ensemble ! La variété oblige a une adaptation efficace.

En résumé, si vous effectuez du travail à haute intensité pour améliorer votre VO2max et ensuite vous allez courir, votre corps ne va pas aimer le changement. Votre corps s’adapte à l’entrainement progressif, il va aussi s’adapter aux stress mécaniques et aux milliers de foulées. Faites moi confiance : vous pouvez peut-être facilement soulever 100kg au push jerk, mais si vous laissez de côté la course et que d’un coup vous devez courir, les risques de blessures sont de beaucoup augmentés. C’est une grosse faille dans votre armure !

Source: http://www.crossfit.com/cf-journal/CFJ64-Dec07-da6celic.pdf
(Leyland, T. (2007), Why a 10k WOD ? Crossfit Journal (64), 9-11)

Traducteur: Teba

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